Pour beaucoup, la première section n’est qu’un échauffement et un moyen de filtrer ceux qui n’ont pas la détermination d’aller jusqu’au bout de l’aventure. C’est définitivement comme ça que je le ressens moi même. Un peu de glace sur les chevilles et… La vraie aventure commence maintenant !
Jour 6 : mile 90,2
C’était un nero aujourd’hui, une journée pendant laquelle j’avais prévu de ne faire que quelques miles à peine. Le matin, je n’ai pas fait grand chose. Repos, glace sur les pieds et le dos, manger… Puis on est allés dans une pizzeria avant de nous remettre en route. Juste avant de mettre mon sac, on a fêté l’anniversaire d’Erica avec un bon gâteau.
L’objectif était de ne faire que 5 ou 6 miles. C’est chose faite ! Le début était le long d’une route assez peuplée, avant de devoir passer sous des barbelés pour rentrer dans un champ de vache et le traverser dans sa diagonale. Mon sac était particulièrement lourd car je portais 2L de vin pour le soir, tandis que les autres portaient différents mets pour marquer le coup.
On s’est installé au beau milieu du champ et avons fait un bon repas avant de nous blottir dans nos sacs de couchage. Il fait très froid aujourd’hui.
Jour 7 : mile 111,1
Comme à mon habitude, réveil à 5h pour un départ très matinal. J’ai une fois de plus très mal dormi à partir de 2h. Il a fait vraiment froid cette nuit, pour la première fois depuis le début de l’aventure. Températures négatives, avec un peu de vent. J’ai eu froid à un moment mais j’utilisais mon sac de couchage comme quilt. J’ai donc tout bien refermé et j’ai pu atteindre une température très confortable en un rien de temps. Je n’utilise même pas ma polaire car je l’ai envoyée bien plus loin, quand les journées se rafraîchirons vraiment.
Au programme de la journée, passer sous de nombreux barbelés et monter dans les hauteurs. Pour la toute première fois de l’aventure, j’ai eu plus de 1000m de dénivelé positif sur la journée. Je me suis retrouvé a 2500m d’altitude avec un cardio qui ne suivait pas trop. Néanmoins, ça commence a venir !
Bien évidemment, je me suis perdu à 2 reprises, mais ce ne serai pas le CDT si ça n’arrivait pas quotidiennement ! Le sentier empruntait tantôt des routes de terre, tantôt des sentiers de sable dans lesquels il était particulièrement désagréable et fatiguant d’avancer. Néanmoins, les vues au sommet étaient vraiment gratifiantes. C’était aussi l’occasion d’avoir un peu plus d’ombre : nous avons enfin des arbres un peu partout ! Bon, il a fait bien plus frais que les derniers jours, et l’altitude doit aussi y être pour quelque chose, mais tout de même, c’est plaisant.
Je suis arrivé au dernier ravitaillement en eau avant une dizaine de miles : un abreuvoir à vaches avec de nombreuses algues flottantes, et sans doutes plus d’abeilles en train de nager qu’en train de voler (alors qu’il y en avait déjà un paquet !). C’est pour ce genre d’eau que j’ai acheté un filtre. J’ai donc remplis mes bouteilles avant de m’installer à l’ombre pour une petite sieste d’une heure. J’ai ensuite goûté l’eau : j’avais l’impression de boire le cul de la vache. Sympa comme infusion ! J’ai masqué le gout avec un liquide sucré et caféiné qui allait m’aider à tenir le reste de la section.
A midi, j’avais déjà fait 13 miles (21km). Les journées commencent à être longue en distance, mon corps prend l’habitude, malgré l’altitude, et c’est vraiment plaisant de voir ces progrès ! Au total, j’ai fait 20,9 miles, soit 34km. Ce n’est que ma deuxième journée à plus de 20 miles et je me sens plutôt bien !
J’ai toujours des douleurs au dos que j’arrive à légèrement calmer, et mes chevilles sont toujours un peu douloureuses et gonflées, mais la situation n’empire pas et j’en prend bien soin.
Arrivant au croisement avec une route, je suis tombé nez à nez avec Solo, une trail angel qui fourni des boissons aux randonneurs depuis maintenant 4 ans. Elle était adorable et m’a raconté un peu comment elle vivait dans son camion depuis maintenant 7 ans. J’ai fini par la quitter pour retrouver Doug un peu plus loin, offrant lui aussi des boissons. J’ai bu, j’ai fait une sieste d’une bonne heure et je suis resté 2h de plus à boire et manger en attendant que le petit groupe n’arrive. Puis je me suis remis en route direction le prochain ravitaillement en eau. J’y suis arrivé une demi heure avant le coucher du soleil. J’ai remplis mes bouteilles, j’ai fait connaissance avec Quentin, un Français qui tente lui aussi l’aventure, puis je me suis couché, toujours à la belle étoile. Depuis le début de l’aventure, je n’ai pas encore monté ma tente une seule fois, et je compte bien continuer comme ça aussi longtemps que possible tant c’est plaisant. Le petit groupe n’aura pas réussi à faire la distance jusqu’au ravitaillement en eau. Je les retrouverai sans doutes demain soir.
En une semaine à peine d’aventure, je ne ressens plus aucun stress. Je suis en paix, j’ai le cœur léger, et je suis excité par cette aventure et cette fabuleuse nature. Qu’il est bon de marcher !
Jour 8 : mile 131,2
Il a fait très froid cette nuit. A tel point qu’une de mes bouteilles commençait à avoir de la glace. Je n’ai pourtant pas eu froid dans mon sac de couchage. C’est que mon matériel est adapté, et c’est parfait ! Comme depuis le début par contre, j’ai beaucoup de mal à dormir entre 2 et 4h. Quand le réveil sonne à 5h, je suis souvent sorti d’un cycle de sommeil profond et je commence à cruellement manquer de repos.
Je me met en route assez rapidement pour essayer de me réchauffer. Comme la veille, il y avait un gros dénivelé de presque 1000m, mais beaucoup plus raide cette fois ci. Sauf que cette fois, mes chevilles commençaient à sérieusement me faire mal. Déjà la nuit, j’avais senti que ça tirait beaucoup même lorsque j’étais au repos, mais là, ça devenait vraiment douloureux pour la marche. J’ai donc ralenti le pas; il me restait encore 46 miles à faire pour atteindre Silver City.
Arrivé au sommet, j’ai pu profiter d’une superbe vue sur le désert tout autour de cet îlot de montagnes. C’était ce type de paysage que j’attendais avec impatience ! Quel plaisir en plus de pouvoir se mettre à l’ombre d’un conifère…
J’ai entrepris la descente alors que la température commençait à monter, mais rien d’affolant, d’autant plus qu’une petite brise venait sécher les gouttes de sueur à peine sorties. Mon sac était par contre très lourd; il n’y a pas d’eau pendant 26 miles soit 42km (2j de marche). J’ai donc porté et bu presque 7L toute la journée.
En bas de cette montagne, je me suis installé le long de la route de terre, j’ai pris des ibuprofènes, fait un massage à mes chevilles et j’ai mis mes pieds en l’air pendant 3h30. C’était douloureux, mais je voulais vraiment réduire l’inflammation autant que possible avant qu’elle ne s’installe trop. J’ai aussi essayé de faire un taping pour aider mes chevilles à moins travailler mais je manquais un peu de longueur car je l’utilise déjà principalement pour mes voûtes plantaires. Le résultat est très mitigé mais j’ai quand même laissé, au cas où.
J’ai repris la route pour quelques miles avant d’à nouveau faire une longue sieste de 2h les pieds en l’air. M&M m’a rejoint et nous avons repris la route. Je ne sentais plus mes pieds à cause des anti douleurs, ce que je déteste particulièrement, mais je n’avais pas le choix, je devais faire dégonfler mes chevilles.
Nous avons poussé 6 miles avant de croiser wendy, une personne âgée qui était en train de charger son coffre de bois fraichement découpé. Je lui ai demandé si elle avait de la glace, ce à quoi elle a répondu que non. Quand j’ai expliqué que c’était pour atténuer les inflammations, elle a sorti une grosse trousse de secours et m’a tendu deux paquets de glace instantané qui libèrent du froid par un procédé chimique. Elle a probablement sauvé mes prochains jours de marche ! Nous avions d’ailleurs croisé une famille d’énormes sangliers sauvages juste après l’avoir quitté. C’était très impressionnant d’en surprendre des sauvages d’aussi près.
On s’est installé au mile 131,2, parmis les innombrables déjections bovines, avons mangés puis j’ai pris soin de mes pieds en traitant la toute première ampoule de toute mon aventure et en utilisant les poches de glace.
Jour 9 : mile 157,6 – Silver City
Je me suis réveillé en pleine nuit avec de grosses douleurs inexpliquée à la cheville gauche. J’étais persuadé que je serai incapable de marcher au petit matin, pourtant, je n’ai pas eu de douleur particulière au réveil. J’ai décalé mon réveil à 6h histoire de dormir un peu plus. La température étant bien moins chaude, il n’est plus nécessaire de se lever si tôt.
Le sentier devait descendre toute la journée, jusqu’à arriver à la voie rapide 180 qu’il faut ensuite remonter sur 13 miles. Sur mon chemin, je croise de nombreuses vaches et quelques écureuils gris très mignons !
Mes chevilles se mettent à gonfler et les douleurs reviennent. Le sable dans lesquel je dois marcher n’aide assurément pas. Je fais quelques pauses histoire de lever mes pieds, je prend des ibuprofènes, mais rien à faire, mon état semble empirer. Je prend donc la décision de faire du stop quand j’arrive au niveau de la voie rapide. Ce n’était pas une décision facile; je saute 13 miles de mon aventure, mais je préserve mes chevilles d’une situation qui pourrait dégénérer. Marcher sur du bitume n’est pas intéressant et c’est surtout assez violent pour les articulations. Il n’est en plus pas possible d’utiliser les bâtons de marche pour alléger un peu le poids sur les pieds. Donc plutôt que de pousser et faire une journée de 26 miles dont la moitié m’aurait probablement handicapé une semaine entière, je préfère ne pas envenimer la situation et me limiter à 2/3j complet de repos, quitte à sauter une petite section sans intérêt particulier.
J’ai été pris en stop par Tim, un fermier du coin qui roule dans une jeep qui n’a ni toit, ni portières. C’était plutôt rafraîchissant comme trajet ! Il m’a déposé en ville où j’ai refait un stock d’ibuprofènes, j’ai acheté de nouvelles chaussettes et je me suis régalé au macdonald’s. J’ai aussi vu des virevoltants pour la toute première fois de ma vie. Moi qui trouvait ça cliché !
J’ai été contacté par Matt, un randonneur avec qui j’avais fait quelques jours de marche sur le PCT en 2016, et celui qui m’avait donné mon nom de randonneur « Fuck-It ». Il habite désormais Silver City et s’est proposé de m’héberger pour une nuit et d’aller boire un verre ensemble. Quelle coïncidence ! Il est venu me chercher au macdonald’s, m’a ramené chez lui pour me présenter son chaton et son chiot, tout deux avides de randonnée et très joueurs. J’ai pu faire une douche, mettre de la glace sur mes chevilles et me reposer. Le soir, il a ramené des bières qu’il a lui même brassées.
J’ai commencé a traiter mes ampoules. Comme sur le PCT, la technique de l’aiguille avec un fil et du gel hydroalcoolique fonctionne parfaitement !
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6 Commentaires
Hello Baptiste,
l’aventure est dingue, c’est un immense plaisir de lire le récit de ton trip au fur et a mesure avec les photos pour illustrer le terrain ! Je suis content que le mental ai surpasser les craintes des préparatifs, kiffe bien comme il faut !
Hello Thibault ! Content que l’aventure te plaise 🙂 j’espère que la suite continuera de te faire rêver !
Salut Baptiste,
merci de nous faire partager cette formidable aventure.
J’espère que tes douleurs aux chevilles vont s’arranger mais des fois un jour ou deux de repos suffit pour faire la différence.
Bon courage pour la suite et porte-toi bien.
Hubert
Salut Hubert ! Content que l’aventure te plaise 🙂 Malheureusement, les chevilles ne suivent toujours pas… C’est repos pour le moment, mais j’espère bientôt pouvoir retourner en nature pour partager de nouvelles aventures !
Bjr Baptiste…… Ce sont tes parents qui m’ont transmis tes aventures (que j’ai rencontrés lors de notre séjour en Espagne !!)
Ton parcours est fascinant et incroyablement osé….. BRAVO pour ce que tu entreprends et je continuerai de lire tes aventures !!! 👏👏👏👏
Bonjour Annie,
Je suis content que cette aventure te plaise, j’espère que les prochains te raviront tout autant 😉
Bonne lecture !