C’est après quelques mois de préparation, d’achat de matériel, de développement d’une application de géolocalisation sur un parcours GPS, et d’entrainements physique à base de 4h de marche par semaine que, mon collègue et ami Sylvain et moi-même avons prix un covoiturage direction Chamonix en cette matinée du 13 juillet 2019.

Qu’allait nous réserver cette aventure ? Nous n’étions pas prêt de l’imaginer…

Première journée, premières difficultés

Arrivés vers 16h sur Chamonix, nous prenons un bus direction Le Tour où notre aventure commencera réellement. Ce bus permet d’éviter de marcher 10km le long de la route principale vers la Suisse; inintéressant donc. Arrivés à Le tour vers 17h, il est temps de marcher.

C’est une montée assez raide qui marque le début de notre aventure. Remontant une piste de ski en plein soleil, la vallée de Chamonix se dessine de mieux en mieux au plus on prend de l’altitude. Le manque de cardio se fait très largement ressentir tant pour Sylvain que pour moi, mais ce n’est que le premier jour; pas besoin de s’inquiéter !

Coucher de soleil vu de nos tentes

Près de 4h de marche plus tard, fatigués de ces 700m de dénivelés positifs sur les quelques 4.5km qui nous séparent de Le Tour, nous arrivons au col de Balme à 2200m. Là haut, la vue sur la vallée est impressionnante. Quelques nuages couvrent le Mont Blanc mais n’entachent en rien la beauté du cadre. C’est face à ce paysage que nous posons nos tentes et préparons notre repas; ramen et purée de pommes de terre.

Au petit matin, c’est une vue dégagée qui agrémentera notre petit-déjeuner.

Notre vue au petit-déjeuner

Le moment où tout a basculé

Une bonne nuit de sommeil plus tard, il est temps de se remettre en route. Départ pour 8h, un petit-déjeuner a base de snickers et de céréales plus tard, et nous voilà en plein descente vers la ville de Trient. Nous sommes désormais en Suisse.

Descente matinale

Une descente assez raide, mais qui nous permet de faire un bon 9km sur la matinée. Sylvain commence à se plaindre de quelques douleurs aux genoux; il n’utilise pas de bâtons de marche. Un investissement à prévoir ?
Arrivés sur Trient, nous prenons un petit détour pour aller voir le col de la Forclaz. Sur place, nous achetons une barquette de fraise qui ne fera pas long feu… Des fruits pour remplacer nos snickers, kitkat et m&m’s ? Pourquoi pas ! Une fois le matériel séché de la condensation du matin, et le repas terminé, on se remet en route direction la fenêtre d’Arpette. Et c’est là que tout a chaviré.

Arrivée au col de la Forclaz

Un début de trail plutôt simple, sur un faux-plat ascendant à l’ombre d’une foret, qui tourne vite au mur surexposé au soleil avec des marches de 20 à 60cm à gravir avec des sacs de 15 à 20kg. La fenêtre d’Arpette se trouve à une hauteur de 2665m nous donnant près de 1200m de dénivelé positif à faire sur… 4km. A bout de souffle, nous sommes obligés de faire des pauses toutes les 5 à 10 minutes. Quand le souffle ne pose pas de soucis, c’est le corps, endoloris et courbaturé de la veille, qui pèche. A bout de force, littéralement, nous sommes contraints de forcer encore et encore sur nos muscles qui n’en peuvent plus. Il m’aura fallu 5h (presque 6 pour Sylvain) pour faire ces petits 4km. Maux de têtes, petits vertiges, bouffées de chaleur et grande fatigue furent omniprésents lors de cette montée. Au sommet, je me suis écroulé de fatigue et endormi pendant une bonne demi-heure.

Ce n’est qu’après cette sieste que j’ai pu pleinement profiter de l’incroyable vue sur la vallée de Trient avec son glacier, et sur l’autre versant de cette montagne. Des paysages à couper le souffle.

Sylvain est arrivé à son tour et sa réaction fut la même: une sieste. Profitant pleinement de ses vues bien méritées, le temps passait et de gros nuages se formèrent. La nuit tombait et nous devions reprendre la route pour redescendre un peu afin de ne pas dormir à trop haute altitude. C’est alors qu’exténués, on se rend compte que la descente est extrêmement dangereuse. Des plaques de neige très raide, des sauts de cailloux en cailloux à faire pour continuer d’avancer… Ca, couplé à notre fatigue; nous n’avancions que très lentement.

Beaucoup trop longs à descendre, nous avons du improviser : sortir du trail et enjamber 150m de gros rochers afin de se poser à coté d’un petit plan d’eau; seul espace à peu près plat des environs. J’y arrive quelques minutes avant la tombé de la nuit. Sylvain, lui, se perd dans le tas de pierres alors que la luminosité diminuait. Il fit une glissade non contrôlée sur la neige de plus de 50m. Par chance, il ne se fit pas mal.

Quelques hurlements plus tard, afin de nous retrouver, il arrive au campement, à bout de force. Nous installons nos tentes proche de l’eau, et c’est sans manger, exténué, que je me prépare à dormir. C’est alors qu’il se met à pleuvoir. De plus en plus fort. Quelques minutes plus tard, un flash lumineux très intense m’éblouis; un éclair.

L’orage gronde en quelques secondes à peine; la foudre tombe à quelques centaines de mètres de nous et résonne dans un vacarme alarmant. Un, deux, trois éclairs… Une tempête qui n’en finissait plus, où chaque flash emplissait nos esprits de crainte. La montée de l’eau juste à coté de nos tentes me rendait tout autant perplexe. Finalement, la fatigue prit le dessus et je m’endormis comme une pierre.

Campement au bord du plan d’eau

Un réveil à la fraîche

C’est entouré de neige que nous nous réveillâmes au petit matin. Il faisait froid et les courbatures se faisaient sentir. Nous devions de nouveau traverser ces 150m de rochers cette fois mouillés et glissants. Après une bonne demi-heure de galère, nous revoilà sur le trail en direction de Champex. Une longue descente où ne nous croisâmes pas grand monde. Arrivés à Champex, nous avons achetés de la nourriture fraîche, des sodas, et nous nous sommes allongés aux abords du lac. C’était aussi l’occasion pour Sylvain d’acheter une paire de bâtons de marche. Mon prêt d’un de mes bâtons l’avait énormément aidé lors de la descente de la fenêtre d’Arpette, et ses genoux commençaient à lui faire mal.

Notre matériel en train de sécher au soleil, nous avons profité de cette après-midi de repos pour nous remettre de nos émotions. Cette section fut le premier gros challenge que nous avions surmontés non sans difficultés et qui nous a rappelé à quel point la montagne peut être capricieuse. Persuadés que le reste de l’aventure serait bien plus simple, nous nous sommes remis en route et avons campés dans un petit coin de campagne à basse altitude. Une nuit à la belle étoile cette fois-ci !

De retour sur un trail abordable

Marchant vers Le Châble, nous avons pris un peu plus de plaisir. Le trail était assez raide mais perdu dans la forêt, aucune autre difficulté se faisait ressentir. Puis vint le moment de la descente vers la ville. Surexposé au soleil, à base de lacets interminables, c’est une descente peu appréciable que nous avons endurés pendant quelques heures. Arrivés en ville, une boisson fraîche était indispensable. C’était par ailleurs l’occasion d’acheter de la nourriture fraîche – entendez une boite de salade de thon – et de recharger nos appareils électroniques.

Peu intéressés par la montée entre Le Châble et Verbier – nous voyions déjà la vallée depuis de nombreuses heures – nous avons pris un bus jusqu’au pied des pistes de cette immense station de ski. Puis l’aventure continue. Un trail assez raide – nous étions en train de remonter des pistes de ski – et peu intéressant qui nous donna finalement une superbe vue surplombant la vallée. En dégustant un snikers en plein soleil, nous nous délectâmes de ces incroyables paysages.

En haut de la station de ski de Verbier

Une nuit réparatrice

Une bonne nuit de terminée, nous nous remîmes en route. Au programme : trois cols de montagne sur la journée sur une distance de 15km. Quelques minutes après notre départ, nous sommes tombés sur trois Israéliens – un père et ses deux fils – qui suivaient le même chemin que nous. Ils nous invitèrent à boire un peu de thé avant d’entamer la première ascension. C’est avec plaisir que nous partageâmes ces quelques instants en leur compagnie. Une bonne heure plus tard, nous voilà au col de Termin, premier de la journée. Un trail assez simple et intéressant à flanc de montagne. Au sommet, nous avions vue sur un beau lac d’altitude à couleur turquoise. Il est temps de reprendre la route. Un petit dénivelé négatif pour ensuite entamer une grosse montée vers le col de Louvie, perché à 2915m d’altitude.

A l’approche des 3000m, la respiration fut de plus en plus difficile. Non sans mal, nous avons réussi à atteindre ce col. Sur la route, c’est une horde d’une vingtaine de bouquetins que j’ai pu admirer, se prélassant en plein soleil. Déjà bien fatigués de notre journée, nous devions nous remettre en route pour atteindre la cabane de Prafleuri; mais le col de Prafleuri se trouvait en plein milieu, a 2975m.

C’est alors que nous reprîmes la route. Une longue, fastidieuse et dangereuse descente sur un mur de neige. Puis un plateau de pierres, de glace, de cours d’eau… Il n’existait plus aucun trail; que des traces que nous suivions au petit bonheur la chance. Non rassuré des passages sur la neige, Sylvain avançait prudemment.

Après de nombreuses montées et descentes toutes plus raides et dangereuses les une des autres, nous arrivâmes face à la dernière montée. Raide, fastidieuse et encore plus haute que le précédent col, nous manquions cruellement d’oxygène. Maux de tête, vertiges… Le tout couplé à une grosse fatigue et au raz le bol des sections difficiles et dangereuses, nous n’attendions que la fin de la journée. Arrivés au col de Prafleuri, Sylvain s’est écroulé de fatigue.

Sylvain qui succombe de fatigue

La journée n’était pourtant pas terminée ! Encore 4km de descente nous séparaient de la cabane de Prafleuri. Nous n’avons donc pas tardé à nous remettre en route. Une longue et fastidieuse descente que nous ne pouvions apprécier du fait de notre état de fatigue avancé.

Plus de deux heures après, nous arrivâmes à la cabane, normalement fermée, mais où une chambre demeurait ouverte gratuitement pour les randonneurs de passage comme nous. Au coin du poêle à bois, en compagnie de deux russes, nous avons mangés de la purée de pomme de terre avec du saucisson, et avons fini le dîner par un peu de thé que nous avions échangé contre du chocolat chaud aux Israéliens. Ces derniers préféraient dormir dehors malgré le froid actuel de la montagne. Nous venions de faire plus de 2000m de dénivelé positif sur la journée, malgré nos courbatures, malgré notre fatigue. Cette difficulté gâchait bien trop les plaisirs que pouvait nous apporter cette randonnée. Les paysages – bien que magnifiques – n’avaient que très peu le gout du bonheur tant nous étions cassés physiquement et psychologiquement.

Nous nous disions qu’une bonne nuit de sommeil dans un vrai lit de cabane de montagne nous préparerait à la journée du lendemain. Nous n’avions jamais eu autant tord.

Une lourde décision

Nuit mouvementé entre les différents ronflements vrombissant dans la chambre commune.

C’est une heure après notre réveil que nous nous sommes mis en route. Deux cols à passer et 18km nous séparant de la ville d’Arolla (Suisse).

Le premier col fut assez simple car rapide à monter bien qu’assez raide. La descente vers le lac des Dix était sommes toutes banale. Puis 7km de randonnée le long du lac sur un plat fort appréciable. Alors que je marchais sur le chemin, un troupeau de vache avançait en contre sens. Sans bouger du chemin, elles me dépassèrent de part et d’autre, certaines curieuses de ma présence ici même. Puis vint l’heure de la montée vers le second et dernier col nous séparant de la ville d’Arolla. Une montée raide, très raide, en plein soleil. Plus de 1000m de dénivelés positifs. Mais arrivés à mi-chemin, tout commençât à se gâter. Une section d’une raideur sans précédent. Plus de 45° d’inclinaison, au beau milieu d’un couloir d’avalanche de pierres, à marcher sur des tuiles instables dont chaque pas les faisaient descendre un peu plus bas dans la vallée… Un cardio en explosion, des muscles à bout de force, et pourtant aucun moyen de s’arrêter tant l’inclinaison était importante. 100, 200, peut être même 300m de montée comme ça, puis un cours d’eau à traverser, toujours aussi incliné, sur des pierres lisses et glissantes. A chaque pas, nous manquions de tomber et les bâtons de marche n’étaient pas la solution miracle à cette galère dans laquelle le trail nous avait mis. A deux reprises, j’ai glissé sur des pierres dans l’eau et ait manqué de dévaler la pente sur des pierres coupantes comme des lames de rasoir. Tous les dix pas, quinze secondes de répit, debout, afin de reprendre notre respiration… Une horreur.

Mais une fois sorti de cette galère, nous n’étions pas au bout de nos surprises.

Nous devions traverser de longues sections de pierres, puis des plaques de neige n’ayant aucune trace de pas. Sylvain est tombé sur l’une d’entre elle et s’est ouvert la main sur les rochers en contrebas. Puis le trail a repris une verticalité hors norme, direction des échelles accrochées à la falaise pour atteindre le Pas de Chèvre. S’en était trop pour nous. Beaucoup trop. Trop de difficulté, trop de risques, pour au finale ne pas réussir à profiter pleinement des paysages et de notre aventure. La décision était prise : nous abandonnerions le trail à Arolla.

Au sommet, nous avons rencontrés un groupe de 8 américains qui faisait ce trail avec des sacs à la journée, dormant dans de beaux hôtels chaque soir. Forts sympatriques, nous avons discutés une petite demi-heure et nous leur avons donné quelques barres chocolatées. Notre aventure touchant à sa fin, nous n’en avions pas besoin d’autant. Le seul point positif de cette journée ? Nous avons enfin aperçut, avec beaucoup de distance, Matterhorn, le mont Cervin de Suisse, celui que l’on retrouve sur toutes les boites de Toblerone.

La descente fut sympathique mais assez longue. Une légère tristesse m’animait du fait de cet abandon. Mais c’était nécessaire. Arrivés à Arolla, nous avons pris un soda et avons posé nos tentes sur un parking.

De retour en ville

Triste de cet abandon, brûlés par le soleil, endoloris de courbatures et psychologiquement à bout, nous avons pris le bus d’Arolla vers Les Haudères. Un petit déjeuner de petits pains et de CandyUp dans le ventre, nous avons fait du stop. Une mère et sa fille, allemandes, nous ont gentiment déposés à Sion où nous avons tenté pendant près de 2h, en vain, de faire du stop jusque la France. Brûlés sur nos brûlures, nous avons abandonné le trail et pris un Blablacar jusque Chamonix. En attendant le covoitureur, nous avons passé quelque temps en compagnie de deux golfeurs qui nous ont invités à prendre quelques verres en leur compagnie afin qu’on leur raconte nos péripéties.

Enfin de retour à la maison, à bout de force, nous prenons une douche et nous couchons sans demander notre reste.

Manque de préparation ?

Il est certain que nous n’étions pas prêts physiquement pour assurer une randonnée de cette difficulté.

Néanmoins, à aucun moment lors de ma préparation de cette aventure je n’ai vu mention d’une pareille difficulté, ni de ces vertigineux murs auxquels nous avons du faire face presque quotidiennement. Nous avions le matériel adéquat ainsi que le mental pour faire cette aventure, mais ce danger ne valait pas la peine d’être encouru.

Et maintenant ?

Encore dans les Alpes pour une bonne semaine, nous avons pris la décision de nous reposer une journée entière avant de nous lancer dans des randonnées plus abordables, à réaliser sur la journée. Rendez-vous la semaine prochaine, donc, pour un nouveau récit de nos aventures en terres moins hostiles !

Vue de la vallée d’Arolla
Travelers' Map is loading...
If you see this after your page is loaded completely, leafletJS files are missing.

Écrire un commentaire