Du mile 766 au mile 772
Aujourd’hui, c’est Whitney ! Le mont Whitney est la seconde plus haute montagne des USA. Haute de 4413m, elle surplombe une grande vallée d’un côté et un désert de l’autre. Le PCT passe juste à côté du trail qui mène vers le sommet. Comme on dit sur le trail : nous sommes dans la meilleure forme physique de notre vie, car on a déjà 766 miles dans les pattes, alors autant en profiter pour le gravir !
Comme si l’ascension n’était pas suffisante, on s’est fixé un objectif : être au sommet pour le levé de soleil. Je suis avec un petit groupe de 6 hikers que je croise tous les jours depuis Kennedy Meadows. D’après les hikers qu’on a vu hier, il faut environ 4h pour aller du campement au sommet. On décide donc de se lever a 1h du matin !
Après cette toute petite nuit, je vide mon sac dans ma tente et je ne remet que ce dont j’ai besoin pour la journée. Mon sac ne pèse pratiquement rien ! A 1h30, on se met en route. Nous avons plus de 1200m de dénivelé positif à faire.
Aujourd’hui, c’est presque pleine lune ! On avance le long de la rivière avec nos lampes frontales. Progressivement, le trail commence a monter. Puis on sors de la forêt. La lune laisse place a un très beau paysage. Nous n’arrivons qu’à distinguer les formes, néanmoins la vallée, les lacs et les montagnes forment un très beau paysage, même en pleine nuit ! On voit aussi pas mal de neige.
Le groupe avec qui je marchais se trouve maintenant bien devant moi. A cause de l’asthme, je suis obligé de ralentir en montée. Au plus je m’approche des lacs au plus je suis perdu. Le trail n’est pas vraiment visible… Il faut traverser un peu n’importe où. Parfois, le chemin n’est autre qu’un ruisseau. Avoir les pieds mouillés en pleine nuit, j’ai connu mieux.
Tout au long de la montée, j’ai pris des vidéos du paysage, même si on ne voit rien, mais ça me permet de parler, d’expliquer ce que je vois, vis et ressent. Le trail monte, monte, monte… Sans cesse ! Le dénivelé est énorme. Je peut voir les lampes du groupe avec qui je suis parti, et un train de lampe derrière moi; nous ne sommes pas les seuls a avoir eu cette idée !
Je traverse un petit ruisseau, des plaques de neiges verglacées car le soleil n’est pas encore là, et de gros rochers. Le ciel étoilé est magnifique ! Il n’y a pas un bruit autour de moi. La lune éclaire tellement bien que je fini par marcher sans lampe.
Il est 4h15 quand j’arrive a une partie entièrement enneigée. Je pense donc ma toute première pause : 5 minutes. Juste le temps pour enfiler mes crampons. Qu’est-ce que mes crampons ? Une grosse paire de chaussette que j’inverse et que j’enfile par dessus mes chaussures. Et je continue ma route. Je peut voir que le ciel s’illumine au loin; je dois me dépêcher ! Néanmoins, cette partie là était vraiment dangereuse. Au total, sur la montée, je suis tombé 4 fois. Je me suis un peu blessé a la main et au genoux mais rien de bien important, juste des égratignures.
J’arrive enfin au sommet ! Il est 5h. J’aurai marché 3h30 ! Impressionnant vu mes capacités respiratoires. Je n’aurai fait qu’une unique pause, de 5 minutes. J’arrive juste avant le levé de soleil. Il fait très froid ! J’ai le temps de sauter dans mon duvet et de m’asseoir avec les autres, a l’abris du vent, sur un rocher face a l’est, a 10cm du vide. Je capte du réseau ! J’appelle mes parents. Ils décrochent 15s après le début du levé de soleil.
J’ai réussi. Les larmes de joies n’en finissent plus. Malgré l’asthme, malgré la hauteur, malgré la solitude, je l’ai fait.
Avant de commencé le PCT, je paraissait peut être confiant, mais je ne pensais pas réussir a marcher autant sur le trail, et arriver jusque sur le sommet du mont Whitney. Aujourd’hui, je viens de me prouver à moi même que je suis capable de faire des choses hors du commun.
Au sommet, on bois une bière que le groupe a ramené, on mange, on chante. Je prends ma photo tout nu : il fait si froid ! Je fais mes besoins avec les fesses au dessus du vide… Plaisant mais dangereux ! Puis on assiste en direct a une demande en mariage ! Elle répondra oui.
Enfin, je me met en route vers le campement. La vue est splendide. Je manque de vocabulaire pour exprimer ce que j’ai vu. Je peux observer le paysage que je ne distinguais qu’à peine pendant la nuit. Je prends énormément de photos.
La chaleur augmente très rapidement ! Et je plains les hikers que j’ai croisés, en train de monter par cette chaleur. Sur la descente, je croise plein de marmottes ! Une bonne partie d’entre elles n’ont pas peur et s’approchent a moins d’un mètre de moi.
A 12h, j’arrive au campement où je mange et me repose. Seulement, la journée ne se termine pas là. Demain, nous allons traverser Forester Pass, le col le plus haut du trail ! Nous enchainons donc deux journées avec un très gros dénivelé… Les cols sont enneigés donc il faut les passer le matin pour éviter de s’enfoncer dans la neige. Seulement… marcher 13 miles en une matinée, c’est compliqué ! Donc a 16h, je quitte le campement, seul, afin d’avancer un peu. Je ferai 6,5 miles et les autres me rejoindront un peu après. 6,5 miles de descente et de montée. Je suis a bout de force. Je longe des plaines et des forêts de séquoia, je croise plein de marmottes et je traverse plusieurs ruisseau.
En France, on se plaint quand on a un bouton de moustique. J’en ai compté 17 sur mes bras. Je me fait dévorer a chaque fois que je traverse un ruisseau. Des dizaines et des dizaines de moustiques se posent en même temps sur moi…
Je campe sur un grand plateau a coté de deux petits lacs. Je suis a plus de 4000 m de haut et il fait très froid quand le soleil se couche. D’ailleurs, aujourd’hui, j’ai vu le lever et coucher de soleil. Au loin, on voit Whitney, orangé par le soleil. Je me couche après une journée de 23 miles avec plus de 2000 m de dénivelé positif, en écoutant les grenouilles.
Comme une journée n’est jamais parfaite, j’ai cassé l’écran de mon téléphone. Je peux néanmoins toujours m’en servir !
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