C’est une section très exigeante, pleine de points d’intérêts que j’attendais avec beaucoup d’impatience. L’été s’est installé en un claquement de doigts et mon corps va avoir besoin d’un peu de temps pour s’adapter, mais je vais apprécier d’incroyables vues. L’état de Virginie n’a pas fini de m’impressionner.

Jour 59 : mile 637,0 – Pearisburg

Journée de repos bien méritée aujourd’hui ! J’ai mangé quelques glaces, quelques burgers, et j’ai surtout profité d’un restaurant mexicain en illimité, payé par LongJonSilver, à l’occasion de Cinco de Mayo, une fête nationale. J’ai mangé une quantité astronomique de nourriture, bu quelques margueritas et passé une excellente après-midi entouré d’une bonne 30aine de randonneurs. Vraiment un moment magique.

Jour 60 : mile 659,1

Réveil bien matinal afin d’être déposé sur le sentier par la navette de l’auberge de jeunesse. Aujourd’hui, je fais un slackpack; mon sac sera déposé un peu plus loin sur le sentier et je ne me baladerai la journée qu’avec un petit sac à dos avec juste ce qu’il me faut pour boire et manger pendant la journée. À 7h30, on est déposé sur le sentier et c’est parti pour une première montée plutôt progressive.

En haut de la colline, la forêt s’ouvre sur des prairies. De là, j’ai une vue incroyable sur les alentours. Le sentier est ensuite très simple, un enchaînement de petites collines pour suivre la crête de cette chaîne de montagne. Un peu plus loin, je me retrouve entouré par 6 chèvres sauvages qui cherchent absolument à mâcher le sel qui se trouve sur mes bâtons de marche. Quand LongJonSilver arrive, elles se ruent sur lui pour lècher ses mollets car il est en short et il a sué.

Je récupère mon sac au bout de 32km. Les premiers pas avec sont particulièrement douloureux tant je m’étais habitué à marcher sans poids sur les épaules ! Je passe au-dessus de quelques rivières puis je traverse la section que les pompiers ont volontairement fait brûlé il y a quelques semaines, afin d’éviter qu’un feu non prévu ne prenne des proportions incontrôlables. Le travail a été fait avec une précision impressionnante. Uniquement la partie gauche du sentier a brûlé, et ça n’a jamais débordé vers la droite.

Après 35km et 1400m de dénivelé positif, j’arrive au campement dans lequel je monte ma tente, je trempe mes pieds dans la rivière en mangeant mon repas, et je me couche sans demander mon reste. Il a fait un temps magnifique aujourd’hui, mais les prochains jours n’annoncent rien d’excitant.

Jour 61 Pluie 15 : mile 675,2

Je viens de faire ma meilleure nuit depuis le début de l’aventure. Au moins 11h de sommeil fort réparateur. Je débute la journée sur les coups de 7h30, passant au-dessus de la rivière qui bordait mon campement. C’était ensuite le début d’une des deux très grosses et raides montées de la journée.

J’étais lent, et c’était particulièrement rocheux toute la journée, travaillant sur mes chevilles. Je n’ai néanmoins pas eu une seule douleur aux chevilles de la journée, un bonheur ! À la fin de la première montée, sous un grand soleil, je suis arrivé à un parking où deux randonneurs faisaient de la trail magic. J’ai pu manger deux burritos, du brownie, des chips, et boire une bière, un coca et un gatorade. J’ai joué avec le chien, et j’ai parlé avec eux pendant tellement longtemps que je n’ai pas vu le temps passer. Après presque deux heures de repos, j’ai repris ma route.

Une heure plus tard, une très grosse averse a débuté, suivie d’un orage. Je me suis réfugié dans l’abri quand j’y suis arrivé, mais l’averse n’a pas voulu se calmer, donc, mon parapluie attaché sur mon sac, j’ai continué ma journée. La descente était assez raide, causant quelques douleurs aux genoux, mais ce n’est que passager. La pluie s’est finalement calmée quelques minutes pendant que j’entamais la seconde montée, avant de reprendre de plus belle. Un peu avant d’arriver au sommet, j’ai eu droit à une seconde trail magic ! Un coca, des chips et quelques snickers.

Au sommet, j’étais dans les nuages, et je me suis rendu compte que pour la première fois depuis le début de l’aventure, la pluie n’est pas froide. Même le vent est plutôt chaud. Typique de la Virginie à cette période là de l’année, c’est aussi le temps que je devrais avoir pendant quelques mois, avec un peu plus d’humidité et de la pluie encore plus régulière. C’est beaucoup moins dérangeant que les pluies froides que j’ai eu jusqu’à maintenant et sur les autres sentiers. C’est presque agréable par moment. Quand je passerai d’un pantalon à un short, et d’un tee-shirt manches longues à un manches courtes, je n’aurai probablement même plus besoin de mettre mes vêtements de pluie. Nous n’y sommes pas encore, mais ça arrive.

Après une seconde descente, longue, raide et douloureuse pour les genoux, j’arrive à l’abri dans lequel je passerai la nuit. Le ciel se découvre et laisse passer le soleil que j’utilise pour tout sécher. C’était une journée un peu plus courte, et plutôt plaisante.

Jour 62 : mile 698,2

Début de journée à 6h30 après une nuit peu réparatrice. Je n’ai pas réussi à dormir tant il a fait chaud. Je n’imaginais pas qu’il puisse faire si chaud alors qu’une semaine plus tôt j’avais de la neige. La température est montée jusqu’à 29 degrés aujourd’hui.

Le sentier est redescendu jusqu’à quelques pâtures puis a entamé une longue montée très exposée au soleil. De là, on a suivi une longue et rocheuse crête sur laquelle j’ai failli me fouler une cheville. C’était aussi une section de presque 16 kilomètres sans eau, et tant moi que le groupe n’avions pas anticipé ça. On s’est tous retrouvés à la source en début de déshydratation.

J’ai bu un litre d’eau avec des électrolytes avant de reprendre la marche. Je n’avais tellement pas de force que j’ai tourné toute la journée en prenant de la caféine. Je dois sérieusement revoir mon alimentation pendant la marche car je manque cruellement de calories. Je souhaite néanmoins limiter mon apport en sucre…

En bas de la montagne, il y avait un cours d’eau que je devais traverser directement dans l’eau car le pont a cédé. Je ne me suis pas fait prier pour faire trempette ! J’ai ensuite fait la seconde grande montée, très exposée au soleil. Brutale. Tout le monde était dans le même état que moi. On a sué à très grosses gouttes. Non sans mal, j’ai atteint le sommet jusqu’à rejoindre un monument érigé en l’honneur d’un militaire américain fortement récompensé. C’était ensuite l’heure de redescendre jusqu’à une seconde rivière dans laquelle je me suis à nouveau baigné. J’ai même eu droit à une bière bien fraîche ! Je n’aurai par contre pas dû la prendre. Avec ses 7,4 degrés d’alcool et ma déshydratation, elle m’a beaucoup fait tourner la tête. Tout le monde était dans ce cas là d’ailleurs.

J’arrive finalement au campement, extenhué. Je monte ma tente et mange dedans tant il y a d’insectes et de tiques autour de nous. J’ai des nausées à cause de la fatigue et de la quantité de nourriture que j’ai mangé ce soir, et surtout, je suis en sueur alors que je suis nu dans ma tente.

Jour 63 Pluie 16 : mile 712,5

La nuit a été un peu compliquée. Il a fait chaud et lourd. Mon sac de couchage est trempé de sueur alors que je ne l’ai pas vraiment utilisé. Je commence ma journée vers 6h30. C’est une longue montée jusqu’à atteindre un petit détour vers Dragon Tooth, deux gros rochers en forme de dent de dragon, qui reposent au sommet de la montagne. Avant d’y arriver, le sentier était plein de rochers et racines, me ralentissant considérablement, et travaillant un peu plus sur les chevilles que je ne le souhaitais. Avec la température et l’humidité, c’est étouffant.

Quand j’arrive au détour, je laisse mon sac et je m’aventure sur ce sentier bien mieux entretenu que l’AT. J’arrive très vite à ces deux massifs que j’escalade immédiatement pour profiter d’une très impressionnante vue à 360 degrés sur les chaînes de montagnes et vallées verdoyantes alentour. Un point de vue des plus incroyables, boosté d’adrénaline d’être au bord du vide alors que le vent souffle. Ce vent est d’ailleurs très apprécié ! Je prend quelques photos et je descend jusqu’à une route sur j’emprunte pour ravitailler à une station service.

Cette descente était particulièrement fastidieuse. Le beau chemin de terre a laissé place à des parois rocheuses nécessitant d’utiliser les mains pour les traverser. Il y a même eu quelques échelles sur certaines parois ! C’est intéressant, mais fatiguant, et ça ralenti beaucoup la marche.

Au magasin, je mange deux pizza, je bois deux kombucha, un coca et un chocolat froid, et je termine le tout avec un paquet de chips et un pot de glace. Pendant ce temps, une très grosse averse tombe. Je retourne ensuite sur le sentier pour m’approcher un maximum de McAfee Knob, l’un des points les plus photographiés de toute l’aventure. Je souhaite le faire de nuit afin de profiter d’un levé de soleil là bas. J’avance rapidement et travers de pâtures qui ont enfin des vaches. Ça remonte de nouveau assez raide. Je suis absolument trempé de sueur. Je n’ai jamais marché par ce genre de météo. C’est l’humidité qui m’achève.

J’arrive enfin à l’abri pour le soir. La température chute un peu et c’est très appréciable. Je mange et je me couche car le réveil va sonner très tôt demain.

Étirements

Jour 64 : mile 730,3 – Daleville

Debout à 4h15 pour un départ à 4h30. Je n’ai pas beaucoup dormi, et j’ai surtout mal dormi, principalement à cause de la température et de l’humidité. Je marche pendant presque une heure en pleine nuit, à la lumière de ma lampe. C’est une montée constante et pas trop raide ce qui est plaisant. Je me fais surprendre par deux paires d’yeux qui me fixent à côté du sentier. En m’approchant, je fais connaissance avec deux chevreuils. Un peu plus loin, j’arrive à McAfee Knob, presque une heure avant le lever du soleil.

McAfee Knob est l’excroissance rocheuse la plus populaire de Virginie. C’est aussi l’un des endroits les plus photographiés de l’Appalachian Trail. Autant vous dire que j’étais très impatient d’y arriver ! Surplombant une grande vallée, cet endroit permet une vue sur de très nombreuses montagnes alentour. Dans un premier temps, nous avions les étoiles et on pouvait distinguer les montagnes. Au plus le temps passait, au plus le paysage s’illuminait devant nous.

La vue était juste incroyable. Inimaginable. Au fond, les montagnes perçaient une couche de nuage. Cette couche qui s’approchait lentement de nous. Le ciel est passé par toutes les couleurs chaudes du lever de soleil. Le moment était magique.

On a fait une longue séance photo, et vous imaginez bien… Ce qui devait arriver arriva.

Une photo nu !

J’ai fini par reprendre la route. Le but était de rejoindre la ville de Daleville à un peu plus de 22km de là. C’était d’abord une longue descente jusqu’à un ravitaillement en eau ; le dernier pour toute la journée. Ensuite, une montée très raide jusqu’à atteindre Tinker Cliffs, un autre endroit très beau. Il s’agit de falaises depuis lesquels on peut voir McAfee Knob. La couche de nuage s’est bien rapprochée de nous et a commencé à passer au-dessus de la crête que nous venions de suivre pendant 9km. De là, c’était une ligne droite mentale jusqu’à la ville. Le sentier n’était par contre pas si simple ! Beaucoup de petits monts assez raides, très rocheux, et j’étais surtout particulièrement fatigué.

Un peu déshydraté, j’arrive à l’hôtel vers 13h dans lequel je m’écroule de fatigue en buvant de l’eau. Je voulais aller au McDonald’s mais j’étais incapable de bouger, donc j’ai juste commandé des pizzas que j’ai mangé dans un bain.

Vu de McAfee knob à droite, depuis Tinker Cliffs
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